Yakshagana : mais qu’est-ce ? Pour le savoir, il faut regarder vers l’Etat indien du Karnataka, où cette forme traditionnelle de théâtre dansé et dialogué se perpétue depuis des siècles. Nous y consacrons un article, et voici l’interview d’une des plus passionnées de ses interprètes, qui enseigne aussi cet art spectaculaire.

Yakshagana: what is that? To find out, we need to look towards the Indian state of Karnataka, where this traditional form of dance and dialogue theater has been transmitted for centuries. We’ve dedicated an article to it, and here’s an interview with one of its most passionate performers, who also teaches this spectacular art.

Priyanka en personnage de Yakshagana (photo : archives personnelles de P. K. Mohan)

Cheminez : Priyanka K. Mohan, vous pratiquez le Yakshagana à Bangalore en tant qu’artiste, et vous l’enseignez. Pourriez-vous expliquer à nos lecteurs francophones ce qu’est le yakshagana ?

Priyanka K. Mohan : Le Yakshagana est un art du spectacle traditionnel du Karnataka, en Inde, qui mêle danse, musique, dialogues et costumes élaborés, mettant en scène des récits mythologiques et historiques. Il est généralement présenté en plein air, d’où son nom de « Bayalata » (Bayalu – plein air ; Aata – jeu). Le yakshagana est originaire de la côte du Karnataka. Il est étroitement lié aux traditions des temples, et constitue pour les fidèles une offrande à leur divinité.
Il s’apparente à l’opéra, mais possède une identité indienne spécifique : maquillage du visage éclatant, gestuelle expressive, mouvements rythmiques. Les représentations, souvent nocturnes, sont accompagnées par des musiciens qui jouent des tambours tels que le chande et le maddale, des tala (cymbales) et de l’harmonium.
Le Yakshagana se décline en deux styles principaux : le Badagutittu et le Tenkutittu. Il est généralement interprété par des hommes. On l’appelle aussi « Gandukale » (Gandu – masculin ; Kale – art). Ces deux dernières décennies, des femmes se sont lancées dans la pratique de cet art.
Pour un lecteur français, on pourrait comparer la narration théâtrale du Yakshagana à la grandeur de la Commedia dell’arte ou de l’opéra traditionnel, mais avec une esthétique typiquement indienne, axée sur des épopées comme le Mahâbhârata, le Râmâyana et les Puranas.

Personnages de Yakshagana (photo Ph. Pratx)
Vidéo Ph. Pratx. La suite en fin de page…

Cheminez: Priyanka K. Mohan, you are a Yakshagana performer and teacher in Bangalore. Could you please explain our French readers what is Yakshagana?

Priyanka K. Mohan: Yakshagana is a traditional performing art from Karnataka, India, that blends dance, music, dialogue, and elaborate costumes to narrate mythological and historical stories. Usually performed in open air , hence also called as “Bayalata” (Bayalu – Open air ; Aata – Refers to play ) . Yakshagana is from the coastal Karnataka . It has a strong connection to temple traditions, where devotees offer Yakshagana as an offering to their deity.
It is similar to opera but has a distinct Indian identity, with vibrant facial makeup, expressive gestures, and rhythmic movements. The performances, often held overnight, are accompanied by live music featuring drums like the chande and maddale, as well as the tala (cymbals) and the harmonium.
Yakshagana has two primary styles—Badagutittu and Tenkutittu.  Usually performed by men . It is also referred to as “Gandukale” ( Gandu – Male/Masculine ; Kale – Art ). In the last 2 decades , we have seen some women enter into this field.
For a French reader, one might compare Yakshagana’s theatrical storytelling to the grandeur of Commedia dell’arte or traditional opera but with a uniquely Indian aesthetic, focusing on epics like the Mahabharata , Ramayana and Puranas.

Cheminez : En Occident, le Kathakali (du Kerala) est bien connu, contrairement au Yakshagana. Pouvez-vous nous expliquer les similitudes et les différences entre le Kathakali et le Yakshagana ?

Priyanka K. Mohan : Le Kathakali est reconnu comme une forme de danse classique indienne, ce qui contribue à sa popularité. À première vue, il est facile de confondre le Kathakali et le Yakshagana, car tous deux se caractérisent par un maquillage élaboré, des costumes éclatants, des instruments de musique similaires et l’utilisation de rideaux. Cependant, malgré ces similitudes, il existe des différences fondamentales.
Le Yakshagana est une danse-théâtre plus folklorique, qui laisse aux interprètes la liberté d’improviser et d’apporter à la narration leur style et leurs interprétations uniques. De son côté, le Kathakali est très structuré et suit un format classique strict. Si les deux formes d’art s’inspirent d’épopées indiennes comme le Râmâyana et le Mahâbhârata, le Kathakali est avant tout une forme de danse, tandis que le Yakshagana intègre à la fois danse et dialogue. De plus, les représentations de Kathakali durent généralement moins longtemps, tandis que les représentations traditionnelles de Yakshagana se poursuivent souvent toute la nuit.

Personnage de Kathakali (photo Ph. Pratx)
Personnage de Yakshagana (photo Ph. Pratx)

Cheminez: In western countries, Kathakali (from Kerala) is well known, unlike Yakshagana. Can you tell us the similarities and differences between Kathakali and Yakshagana?

Priyanka K. Mohan: Kathakali is recognized as a classical dance form of India, contributing to its greater popularity. At first glance, it is easy to mistake Kathakali and Yakshagana as the same, as both feature elaborate makeup, vibrant costumes, similar musical instruments, and the use of curtains in performances. However, despite these similarities, there are key differences.
Yakshagana is a more folk-oriented dance-drama, allowing performers the freedom to improvise and bring their unique style and perspectives to the storytelling. In contrast, Kathakali is highly structured and follows a rigid classical format. While both art forms draw inspiration from Indian epics like the Ramayana and Mahabharata, Kathakali is primarily a dance form, whereas Yakshagana integrates both dance and spoken dialogue. Additionally, Kathakali performances are typically shorter in duration, whereas traditional Yakshagana performances often continue through the night.

Cheminez : Vous venez de parler du Ramayana et du Mahabharata : le Yakshagana tire-t-il toujours son inspiration des anciennes épopées et de la mythologie ?

Priyanka K. Mohan : Le Yakshagana puise principalement ses récits dans les épopées et la mythologie indiennes anciennes, telles que le Râmâyana, le Mahâbhârata et le Bhagavata Purana. La tradition étant transmise oralement de génération en génération, les représentations les plus courantes s’inspirent de ces récits. Nombre d’entre eux mettent en scène des batailles héroïques, des dilemmes moraux et des interventions divines, donnant vie à ces récits millénaires par la musique, la danse et le dialogue.
Cependant, le Yakshagana ne se limite pas à la mythologie. Au fil du temps, il s’est étendu aux contes historiques, aux légendes locales et même à des thèmes contemporains. Par exemple, notre association Yakshadegula a mis en scène plus de 4 000 représentations de Yakshagana axées sur des sujets de sensibilisation sociale tels que le VIH, le droit à l’éducation, la conservation de l’eau, le droit de vote, la grippe H1N1, la dot, etc.
Des films à succès ont également été adaptés en pièces de Yakshagana. Bien que de telles expériences soient rares, elles mettent en évidence la nature évolutive de cette forme d’art et sa capacité à captiver le public moderne tout en conservant son essence traditionnelle.

Elèves de Yakshagana pratiquant le tala (figures rythmiques) (photo Ph. Pratx)

Cheminez: You just told about Ramayana and Mahabharata: does Yakshagana always  draw its inspiration from old epics and mythology?

Priyanka K. Mohan: Yakshagana primarily draws its stories from ancient Indian epics and mythology, such as the Ramayana, Mahabharata, and Bhagavata Purana. Since the tradition has been orally passed down through generations, the most common performances feature stories from these epics. Many depict heroic battles, moral dilemmas, and divine interventions, bringing these age-old narratives to life through music, dance, and dialogue.
However, Yakshagana is not limited to mythology. Over time, it has expanded to include historical tales, local legends, and even contemporary themes. For example, our organization Yakshadegula has staged over 4,000 Yakshagana performances focusing on social awareness topics such as HIV, Right to Education, water conservation, voting rights, H1N1, dowry, and more.
There have also been instances where super-hit movies have been adapted into Yakshagana plays. While such experiments are rare, they showcase the art form’s evolving nature and its ability to engage modern audiences while retaining its traditional essence.

Cheminez : Quelle est l’importance des costumes et du maquillage – qui sont très impressionnants – dans Yakshagana ?

Priyanka K. Mohan : Les costumes et le maquillage jouent un rôle crucial dans le Yakshagana : ils contribuent à définir les personnages, à enrichir la narration et à créer une expérience visuelle immersive. Les costumes, les couvre-chefs et le maquillage élaborés ne sont pas seulement esthétiques, mais constituent de puissants symboles visuels qui traduisent la nature de chaque personnage.
Le maquillage audacieux, avec ses traits épais et ses yeux exagérés, magnifie les expressions, rendant les émotions perceptibles même de loin. C’est essentiel pour les représentations nocturnes en plein air. Les représentations se déroulaient généralement autour de petits feux allumés sur scène, et la faible luminosité nécessitait des costumes élaborés pour accentuer l’effet. Les couvre-chefs imposants (kirita), les jupes larges et évasées et les bijoux ornementaux confèrent une présence plus grande que nature, donnant aux artistes une allure divine ou surnaturelle, en accord avec les thèmes de Yakshagana.
C’est un art qui captive visuellement le public, faisant du Yakshagana une expérience immersive au-delà de la musique et des dialogues.

Préparation du spectacle : maquillage, habillage (photo Ph. Pratx)
Artiste costumé et maquillé interprétant le personnage du démon Kamsa (photo Ph. Pratx)

Cheminez: What is the importance of costume and make up – which are very impressive – in Yakshagana?

Priyanka K. Mohan: Costume and makeup play a crucial role in Yakshagana, helping define characters, enhance storytelling, and create a visually immersive experience. The elaborate costumes, headgear, and facial makeup are not just for aesthetics but serve as powerful visual symbols that convey the nature of each character.
The bold facial makeup with thick lines and exaggerated eyes helps amplify expressions, making emotions visible even from a distance. This is essential for open-air, night-long performances. The performances mostly happened in small fires that were lit around the stage , the poor lighting needed elaborate costumes to bring out the effect . The towering headgear (kirita), wide flared skirts, and ornamental jewelry create a larger-than-life presence, making performers look divine or supernatural, aligning with the themes of Yakshagana.
The dramatic visuals captivate audiences, making Yakshagana an immersive experience beyond just music and dialogue.

Cheminez : Traditionnellement, vous le disiez, le Yakhagana était exécuté dans les temples. Est-ce toujours le cas aujourd’hui ?

Priyanka K. Mohan : Traditionnellement, le Yakshagana était exécuté dans les temples comme une offrande dévotionnelle en même temps qu’une narration, souvent lors de fêtes religieuses. Ces représentations, appelées Bayalata (spectacles théâtraux en plein air), étaient profondément ancrées dans les traditions des temples et duraient toute la nuit, captivant les fidèles par des récits tirés des épopées hindoues. Les familles qui fréquentent les temples organisent également des Harike Aata en offrande religieuse (Harike) dans les temples ou sur leurs propres terres, où la représentation est dédiée à une divinité, en signe de dévotion et d’accomplissement d’un vœu. C’est une approche surtout rituelle.
Ces représentations ont toujours lieu. Les temples de la côte du Karnataka sont associés à deux ou trois troupes. Elles continuent de se produire aujourd’hui et leur avenir est garanti : on réserve à l’avance leurs prestations.
Cependant, le Yakshagana a également évolué au-delà des espaces religieux, par exemple avec des organisations comme la nôtre : nous sommes en milieu urbain et nous proposons au public une approche non religieuse.

(Photo Ph. Pratx)

Cheminez: Traditionnally, Yakhagana was performed in temples, as you said. Is it always what happens nowadays?

Priyanka K. Mohan: Traditionally, Yakshagana was performed in temple as a form of devotional offering and storytelling, often during religious festivals. These performances, known as Bayalata (open-air plays), were deeply tied to temple traditions and lasted through the night, engaging devotees with narratives from Hindu epics. The families who go to the temples , also have Harike Aata as a religious offering (Harike) in temples/their own fields, where the performance is dedicated to a deity as an act of devotion and fulfillment of a vow. It follows a more ritualistic approach.
These performances still happen. The temples in coastal Karnataka have 2-3 troupes associated with them . And, they continue to serve till date and have bookings for future too.
However, Yakshagana has also evolved beyond temple spaces like with organizations like ours , we are in urban and cater to audience in a non-religious offering.

Cheminez : Le Yakshagana était réservé aux hommes. Vous êtes la preuve vivante que les choses ont changé. Comment et pourquoi ce changement s’est-il produit ?

Priyanka K. Mohan : Traditionnellement, le Yakshagana est une forme d’art à prédominance masculine, où les hommes interprètent des rôles masculins et féminins. Cette pratique est ancrée dans les normes culturelles et les traditions des temples, où la participation des femmes n’étaient pas autorisée. De plus, le terrain et les conditions climatiques des Ghâts occidentaux indiens étant difficiles, on considérait qu’il revenait aux hommes de se déplacer pour se produire dans une telle région.
À ce jour, aucune femme artiste n’est associée à des troupes de temples, mais plusieurs femmes comme moi ont fait carrière dans le Yakshagana au cours des deux dernières décennies.
L’accès à l’apprentissage s’est amélioré, permettant aux femmes d’accéder à cet art.

Jeune fille se formant au Yakshagana à Yakshadegula (photo Ph. Pratx)

Cheminez: And Yakshagana was only allowed for men. You are the living proof that this has changed. How and why did this changement happen?

Priyanka K. Mohan: Traditionally, Yakshagana is a male-dominated art form, with men performing both male and female roles. This was rooted in cultural norms and temple traditions, where women were not allowed to participate. Also, the terrain and weather conditions of Western Ghats of India were difficult, hence men choosing to move around performing was a norm.
Till date, no women artists are assocaited with temple troupes , but several women like me have made careers in Yakshagana in the last 2 decades.
Accessibility to learning increasing , women have been able to pick up this artform.

Cheminez : En tant qu’interprète de Yakshagana, quand avez-vous commencé votre apprentissage et à quel point cela a-t-il été difficile ?

Priyanka K. Mohan : Mon apprentissage du Yakshagana a débuté à l’âge de six ans, sous la profonde influence de la passion de ma famille pour cet art. Mon père, K. Mohan, passionné de Yakshagana, a fondé Yakshadegula en 1981 pour promouvoir et préserver ce théâtre-danse traditionnel. Ayant grandi à Bengaluru, j’ai baigné dans un environnement où le Yakshagana occupait une place importante dans la vie quotidienne, avec de nombreux artistes et spectacles. Baigner ainsi précocement dans le Yakshagana nous a conduites, ma sœur et moi, à commencer à apprendre cet art sous la direction de notre père. À huit ans, je jouais dans des troupes d’enfants et, avant même d’avoir terminé mes études, j’avais participé à plus de 300 spectacles.
Pour moi, en raison de mon caractère introverti, la difficulté liée à la pression psychologique de l’apprentissage de cet art était bien plus grande que la difficulté physique. Mais j’ai quand même mené à bien cet apprentissage, puisque, dans notre famille, il le fallait. Avec le temps, et à l’occasion d’une brève pause à l’adolescence, j’ai compris à quel point j’appréciais cet art.
À 19 ans, j’ai commencé à enseigner le Yakshagana, devenant ainsi l’une des rares femmes « gourous » dans ce domaine traditionnellement masculin. Ce rôle d’enseignante était plus exigeant que celui d’enfant artiste.

Priyanka adolescente (photo : archives personnelles de P. K. Mohan)

Cheminez: As a Yakshagana performer, when did you start learning, and how difficult was it?

Priyanka K. Mohan: My journey into Yakshagana began at the age of six, deeply influenced by my family’s passion for the art form. My father, K. Mohan, a Yakshagana enthusiast, established Yakshadegula in 1981 to promote and preserve this traditional dance-drama. Growing up in Bengaluru, I  was immersed in an environment where Yakshagana was a significant part of daily life, with numerous artists and shows. This early exposure led me and my sister to start learning Yakshagana under our father’s guidance. By the age of eight, I was performing in children’s ensembles, and before completing school, I had participated in over 300 shows.
For me, the pressure of learning the artform as an introvert was difficult more than the physical difficulty . But , I learnt it anyway as it was in the family. But over period of time , I developed a profound appreciation for the art during a brief hiatus in my teenage years.
At 19, I began teaching Yakshagana, becoming one of the few female gurus in this traditionally male-dominated field. This role as teacher was more challenging than a child performer.

Cheminez : Pouvez-vous nous en dire plus sur Yakshadegula, et sur le rôle de votre père et votre famille dans votre apprentissage et votre carrière ?

Priyanka K. Mohan : Yakshadegula est une institution renommée fondée en 1981 par K. Mohan, mon père, dans le but de préserver, promouvoir et enseigner le Yakshagana à Bengaluru. Au fil des ans, elle a formé des milliers d’étudiants et donné plus de 4 000 représentations, abordant aussi bien des récits mythologiques traditionnels que des thèmes sociaux pertinents. Ayant grandi dans cet environnement, le Yakshagana est devenu indissociable de ma vie. La profonde passion de mon père pour cet art m’a ouvert un monde peuplé d’artistes, de musiciens et d’érudits, faisant du Yakshagana un élément naturel de mon éducation. Comme je le disais, j’ai commencé à apprendre cet art à l’âge de six ans et, à huit ans, je jouais déjà dans des troupes d’enfants. Mes premières expériences sur scène, combinées aux encouragements constants de mon père, ont forgé mon lien profond avec le Yakshagana.
Yakshadegula m’a offert un tremplin non seulement pour me produire, mais aussi pour explorer cet art sous de nouvelles formes, en formant plus de 2 000 personnes et en travaillant sur des thèmes expérimentaux. Mon parcours dans le Yakshagana est profondément indissociable de l’influence de ma famille, notamment la vision de mon père, et les solides fondations posées par le Yakshagana continuent de façonner ma carrière et ma passion pour cet art traditionnel. Mon désir de poursuivre mon parcours dans le domaine du Yakshagana est également né en comprenant qu’il est très difficile de mettre en place des organisations qui œuvrent avec constance pour une cause au point d’en faire des institutions. Cet art a besoin de plus de travail et nous avons besoin de lui. C’est donc devenu mon objectif pour le reste de ma vie.

Membres de Yakshadegula en 2002 (photo : archives personnelles de P. K. Mohan)

Cheminez: What is Yakshadegula, and can you tell us more about the part your father and your family played in your learning and your career?

Priyanka K. Mohan: Yakshadegula is a renowned Yakshagana institution founded in 1981 by K. Mohan, my father, with the aim of preserving, promoting, and teaching Yakshagana in Bengaluru. Over the years, it has trained thousands of students and staged over 4,000 performances, covering both traditional mythological stories and socially relevant themes. Growing up in this environment, Yakshagana became an inseparable part of my life. My father’s deep passion for the art exposed me to a world filled with artists, musicians, and scholars, making Yakshagana a natural part of my upbringing. As I said, I began learning the art at the age of six and, by eight, I was already performing in children’s ensembles. My early experiences on stage, combined with my father’s constant encouragement, shaped my deep connection with Yakshagana.
Yakshadegula provided me with a platform not only to perform but also to explore the art form in new ways, from training over 2,000 individuals to working on experimental themes. My journey in Yakshagana has been deeply rooted in my family’s influence, especially my father’s vision, and the strong foundation laid by Yakshadegula continues to shape my career and passion for this traditional art. My passion to continue to work with Yakshadegula also has come from the understanding that it is very difficult to build organizations who consistently work towards a cause and turn it into institutions. The artform needs more work and we need the artform. Hence this has become my focus for the rest of my life.

Cheminez : Pouvez-vous nous parler de vos plus grandes satisfactions en tant qu’enseignante ?

Priyanka K. Mohan : Lorsque j’ai débuté mon parcours d’enseignante il y a 17 ans, cela n’a pas été simple. Il a fallu lutter contre ce que je croyais être mes propres limites et contre un manque de confiance en moi. J’avais du mal à m’ouvrir pleinement et à avoir confiance en mes capacités. Cependant, au fil de ma progression, je me suis rendu compte que j’apprenais bien plus que j’enseignais. Ce parcours m’a transformée en une perpétuelle étudiante de cette forme d’art, et cela me procure une immense satisfaction.
L’un des aspects les plus enrichissants de cette expérience a été de voir les enfants, qui ont rejoint l’organisation à l’âge de six ans, grandir au sein de l’organisation. Aujourd’hui, nombre d’entre eux ont endossé des rôles au-delà du simple spectacle, ce qui renforce ma conviction que l’avenir du Yakshagana est entre de bonnes mains.
Mon incursion dans l’enseignement numérique a également été un tournant, en me permettant de mettre en relation davantage d’artistes. Nombre de personnes qui avaient déjà appris cet art, mais qui avaient du mal à garder le contact en raison de leur travail et d’autres obligations, ont trouvé dans mes vidéos une ressource précieuse pour poursuivre leur pratique et leur engagement. En tant qu’art populaire, le Yakshagana requiert une approche pédagogique particulière, et sa déclinaison en leçons accessibles via des plateformes en ligne a permis à de nombreuses personnes d’approfondir leur compréhension. Cette capacité à partager et à pérenniser cet art par des moyens modernes s’est avérée extrêmement enrichissante.

Priyanka, des élèves et autres membre de Yakshadegula en avril 2025 (photo Ph. Pratx)
Cours en ligne : première leçon donnée par Priyanka sur YouTube

Cheminez: Can you tell us about your best satisfactions as a teacher?

Priyanka K. Mohan: When I began my journey as a teacher 17 years ago, it was anything but easy. Struggling with self-limiting beliefs and a lack of confidence, I found it challenging to fully open up and trust in my abilities. However, as I progressed, I realized that I was learning far more than I was teaching. This journey has transformed me into a lifelong student of the art form, which brings me immense satisfaction.
One of the most fulfilling aspects of this experience has been watching children who joined at the age of six grow within the organization. Today, many of them have taken on roles beyond just performing, reinforcing my belief that the future of Yakshagana is in the right hands.
My foray into digital teaching was also a turning point, allowing me to bring more artists online. Many individuals who had previously learned the art but struggled to stay connected due to work and other commitments found my videos to be a valuable resource in continuing their practice and engagement. Being a folk art form, Yakshagana requires a distinct approach to teaching, and breaking it down into accessible lessons through online platforms helped many gain a deeper understanding. This ability to share and sustain the art through modern means has been incredibly rewarding.

Cheminez : Avez-vous déjà eu des étudiants étrangers ? Et êtes-vous déjà allée à l’étranger pour présenter des spectacles de Yakshagana ?

Priyanka K. Mohan : Notre organisation a accueilli quelques étudiants étrangers pour une courte période, mais sans lien à long terme avec cet art. Yakshadegula s’est produit dans de nombreux pays. Cependant, personnellement je n’ai pas encore donné de représentation hors de l’Inde.

Jeune élèves de Priyanka (photo Ph. Pratx)

Cheminez: Have you ever had foreign students? And have you ever been abroad to perform Yakshagana?

Priyanka K. Mohan: The organization has had a few of foreign students learn the artform for a very short period of time . But not long term association with the artform. Yakshadegula has performed in many countries. But , individually I am yet to perform outside India.

Cheminez : Que diriez-vous pour convaincre quelqu’un – quelle que soit son origine – d’apprendre le Yakshagana ?

Priyanka K. Mohan : Des formes d’art comme le Yakshagana sont porteuses de 700 à 800 ans de sagesse, transmises de génération en génération. L’apprentissage du Yakshagana ne se résume pas à la maîtrise d’un art : c’est un voyage holistique qui nourrit physiquement, mentalement et spirituellement. Il favorise l’expression, la discipline et la créativité, tout en développant force et endurance grâce à ses mouvements dynamiques. Plus qu’un simple spectacle, il s’agit d’une tradition vivante qui vous connecte à l’histoire, aux épopées et à une profonde conscience de soi. Peu importe d’où vous venez, le Yakshagana offre une expérience enrichissante qui vous transforme en une personne plus résiliente, expressive et consciente. Dans le monde moderne, la notion de divertissement a radicalement changé. Mais quoi qu’il en soit, il n’est pas concevable de laisser perdre des trésors comme ces formes d’art, qui ont tant à offrir.

Scène de Yakshagana, inspirée d’un Purana (photo Ph. Pratx)

Cheminez: What would you say to convince a person to learn Yakshagana, wherever this person comes from?

Priyanka K. Mohan: Art forms like Yakshagana carry 700-800 years of wisdom, passed down through generations. Learning Yakshagana is not just about mastering an art — it is a holistic journey that nurtures you physically, mentally, and spiritually. It enhances expression, discipline, and creativity, while also building strength and endurance through its dynamic movements. More than just a performance, it is a living tradition that connects you to history, storytelling, and a deep sense of self. No matter where you come from, Yakshagana offers an enriching experience that shapes you into a more resilient, expressive, and mindful individual. And with modernization, the idea of entertainment has completely changed. However, we cannot lose treasures like these artforms which has so much more to offer.

Cheminez : Quels sont vos projets, vos attentes et vos espoirs pour l’avenir ?

Priyanka K. Mohan : Mon espoir est que le Yakshagana et les autres formes d’art indiennes fassent partie intégrante de la vie de chacun, sans qu’il soit besoin de lutter constamment pour les faire perdurer. J’imagine un avenir où les artistes seront respectés, où leur travail sera empreint de dignité et où la pratique de ces formes d’art deviendra une source d’inspiration pour les jeunes. Je vois également le Yakshagana évoluer pour raconter des histoires qui parlent profondément à la génération actuelle, ce qui le rendrait plus pertinent tout en restant ancré dans la tradition. Repousser les limites, toucher des publics au-delà du Karnataka et de l’Inde, et créer un espace dédié à l’apprentissage de cette forme d’art font partie de ce rêve.

Ph. Pratx aux côtés de P. K. Mohan et des artistes et élèves de Yakshadegula

Cheminez: What are your plans, your expectations and your hopes for future?

Priyanka K. Mohan : My hope is for Yakshagana and other Indian art forms to become an integral part of everyone’s life, not something that requires constant effort to keep alive. I envision a future where artists are respected, their work holds dignity, and pursuing these art forms becomes aspirational for young people. I also see Yakshagana evolving to tell stories that resonate with today’s generation, making it more relevant while staying rooted in tradition. Breaking boundaries, reaching audiences beyond Karnataka and India, and creating a dedicated space for people to immerse themselves in learning the art form are all part of this dream.Cheminez : Priyanka, un grand

Cheminez : Priyanka, un grand merci pour vos réponses, et pour votre accueil à Bangalore. Merci à Yakshadegula !

Cheminez: Priyanka, thanks so much for this interview and for your warm welcoming to Bengaluru. Thanks to Yakshadegula!

Le sourire de cette interprète pour terminer… (photo Ph. Pratx)

Une réponse à « Priyanka K. Mohan : la passion du Yakshagana (INTERVIEW) »

  1. Avatar de Rajesh Sajnani
    Rajesh Sajnani

    I myself witness this performance for the first time, I came to know about this through Philippe while his visit to Bangalore.
    It’s a power packed performance with so much details and efforts in costumes and makeup. The echo of the music, the dance and facial expressions keeps you glued to each moment of the show, wanting to see more. Also thanks to Priyanka for showcasing this tradition and cultural performance through these children who put in hours of efforts and passion. Certainly would be happy to see so much more.

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