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Décidément, les amoureux et les curieux de culture bretonne vont avoir de quoi lire au chaud, alors que l’on entre de plein pied dans l’automne ! En effet, quelques semaines à peine après la publication de la première autobiographie d’Alan Stivell, les éditions Ouest-France publient Gwerz Denez, un magnifique ouvrage comprenant l’ensemble des gwerz écrites par Denez Prigent, le barde à la voix d’or, qui nous avait accordé un entretien d’une heure à découvrir ici.

Connu du grand public depuis 1992, Denez Prigent est rapidement devenu une des figures emblématiques du renouveau de la chanson bretonne. Après un premier album a capela, Ar Gouriz Koar, il enregistre plusieurs albums, dans lesquels il mélange habilement les genres traditionnels bretons, que sont la gwerz et le kan ha diskan, avec des sonorités électroniques et des instruments venus d’ailleurs. 

Artiste touche à tout, Denez Prigent a enregistré en 2022 son douzième album, Ur Mor a Zaeloù (« une mer de larmes », en breton), consacré à un genre qui lui est cher : la gwerz. C’est ce chant sacré né de la rencontre entre « le génie poétique des bardes gallois exilés[…] avec celui des bardes [bretons] » qui est au cœur de Gwerz Denez, son deuxième ouvrage poétique après Kañv (2018). 

Crédits : Couverture de Gwerz Denez par @EmmanuelPain

Alors que la poésie et le chant bretons ont longtemps été réduits au folklore dans son acceptation la plus péjorative, cet ouvrage de plus 800 pages bilingues leur redonne leurs lettres de noblesse. Gwerz Denez n’est pas un ouvrage à ranger au rayon des « Généralités sur les musiques du monde », mais au contraire un véritable ouvrage de littérature, qu’aurait sans doute apprécié Georges Sand, fervente lectrice du Barzaz Breiz de Théodore Hersart de la Villemarqué. 

Après avoir fait vibrer nos âmes avec sa voix puissante, d’abord nue, puis accompagnée d’instruments, électroniques, acoustiques, exotiques, il nous propose de redécouvrir la gwerz autrement. Lorsque l’on se retrouve seul face à cet ouvrage, sa magie opère : si la lecture peut se faire dans le silence le plus absolu, raisonne toujours un dialogue avec la Mort, avec le Temps et les Éléments. 

Mais à qui s’adresse Gwerz Denez ? Sans doute à tout le monde, même si l’on imagine que les premiers qui se jetteront sur cet ouvrage seront les amoureux de la Bretagne, les fans de Denez Prigent, et peut-être les amateurs de poésie. Mais qu’y trouveront-ils ? Assurément beaucoup de choses. 

Crédits : Denez Prigent, par Emmanuel Pain

Les amoureux de la Bretagne éternelle trouveront, avec les fontaines sacrées, les barques fantômes et l’omniprésence de L’Ankou, de quoi assouvir leur soif inextinguible de culture et de mysticisme celtiques. 

Les fans de Denez, quant à eux, trouveront non seulement toutes les gwerz que le chanteur a enregistrées au cours de sa carrière, retranscrites en breton et traduites en français, mais également de nombreuses gwerz inédites. 

Enfin, l’amateur de poésie trouvera dans ces vers, au-delà de la forme, la profondeur et la sagesse que seuls les récits ancestraux sont capables d’offrir. 

Mais ce que chacun trouvera, c’est cette leçon, indispensable dans une société devenue hypersensible à la question de la mort depuis la pandémie de Covid-19, et que nous résume merveilleusement Philippe Le Guillou dans sa préface : Denez nous offre la certitude que « le deuil [n’appelle] pas de travail – affreuse et froide formule chère aux cliniciens de la psyché –, seulement une traversée, un dialogue mystérieusement entretenu avec [nos] morts, une constellation de présences qui ne meurent jamais ». 

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