Cheminez : Bonjour Christiane Metzger, pouvez-vous vous présenter, et nous raconter votre parcours ?

Christiane Metzger : Je m’appelle Christiane Metzger et le mois prochain je vais fêter mes 64 printemps. Mon cheminement pour la défense et surtout la reconnaissance de notre patrimoine linguistique ne date pas d’hier mais c’est la création des grandes régions (une ineptie totale) et la disparition programmée et forcée de la région Alsace, qui a déclenché tout le reste.

J’ai été candidate aux élections départementales de 2015 (20,05 %) sous les couleurs du parti régional Unser Land, puis aux cantonales. Séjournant régulièrement au Québec, je mesure l’écart, en ce qui concerne le bilinguisme, de nos deux pays et ça me met en colère.

J’ai organisé des colonies de vacances immersives en langues régionales. Les premières ont eu lieu en 2017. Le Covid a tiré un trait définitif sur cette activité. Je suis membre du collectif « Pour que vivent nos Langues » et je suis la présidente du Fonds International pour la Langue d’Alsace (FILAL) depuis janvier 2020. 

Cheminez : Vous avez créé une crèche immersive en Alsace. Pouvez-vous nous raconter la genèse ? Comment vous est venue l’idée ? Quelles ont été les difficultés auxquelles vous avez été confrontée ? Qui vous a aidée dans cette initiative ? 

Christiane Metzger : Le but du FILAL a toujours été la création de micro-crèches immersives à l’image de ce qui se passe en Bretagne, au Pays Basque, en Catalogne… Ce qui est possible ailleurs, ne l’est pas forcément en Alsace… Nous nous sommes heurtés, pendant des années, à la « frilosité » des élus alsaciens. Très souvent ceux-ci étaient encore victimes du « complexe alsacien » relatif a la dernière guerre.

L’Etat français et l’Éducation nationale, ayant tout fait depuis des décennies pour « tuer » toutes les langues régionales, il est très compliqué, de nos jours, pour les jeunes personnes de transmettre notre langue aux futures générations. Ce qui justifie pour nous l’existence d’une micro-crèche immersive. Nous ne vivons que de dons et nous avons mis 10 ans à réunir la somme nécessaire pour créer la première à Neuwiller les Saverne. 

Nous devons beaucoup à l’envie et au soutien de la commune de Neuwiller les Saverne – qui est la première commune à nous avoir ouvert les bras -, de son maire Daniel Burrus, de sa conseillère municipale Anastasie Leipp, ainsi qu’à un généreux don. C’est grâce à eux que nous avons pu lancer le chantier de la micro-crèche. Nous sommes partis d’anciens locaux situés sous l’école maternelle, qui servaient d’entrepôt pour les ouvriers communaux, qu’il a fallu entièrement modifier et réhabiliter.

Les travaux ont duré 4 mois et la micro-crèche a ouvert ses porte début octobre 2022. Elle a pour parrains : Paul Molac, breton et député du Morbihan et rapporteur de la loi Molac pour la défense des langues régionales, et François Alfonsi, corse et député européen, défendant également les langues régionales.

Cheminez : La crèche vient d’ouvrir. Comment se passent les journées des enfants au sein de la crèche ? Quelle place pour la culture ? Qu’est-ce qu’on transmet aux enfants en plus de la langue ?

Christiane Metzger : Les journées se passent comme dans n’importe quelle autre crèche. La seule différence c’est qu’on y parle qu’en langue régionale. Le français est réservé aux parents non dialectophones et uniquement dans le bureau de la directrice. Ce sont de tout petits enfants, il ne saurait donc être question de « culture » au sens large du mot. Les chansons et les histoires sont en langue régionale.

Cheminez : Quels sont vos projets pour l’avenir ? Avez-vous pensé au café des parents ? Avez-vous des partenariats avec d’autres structures à développer ? 

Christiane Metzger : Nous avons plusieurs projets. D’abord, donner l’envie à d’autres de réaliser le même genre de structures ; ensuite, créer nous-mêmes une seconde, voire une troisième. Nous ne vivons que de dons… Nous ferons donc en fonction de nos moyens. 

Nous sommes sollicités, maintenant que la première existe, par d’autres communes, mais la compétence « crèches » est du ressort des Communautés de Communes ; il nous faut donc passer au-dessus de l’ego des différents élus.

Votre commentaire

Votre adresse de messagerie ne sera pas publiée. Les champs obligatoires sont indiqués avec *

Tendances